Kamel Mennour is pleased to present Daniel Buren’s exhibition, ‘Pyramidal, hauts-reliefs, travaux in situ et situés, 2017’.
‘There can’t be vision without thought.’ This statement by Daniel Buren underpins a considerable body of work that over five continents and more than fifty years has opened our contemporary ways of seeing to horizons as much inventive as they have been disorientating. For his fifth exhibition at the galerie kamel mennour, Buren is exploring new perspectives. ‘Pyramidal, hauts-reliefs, travaux in situ et situés, 2017’ reboots and reconsiders the stakes of the mythical form of the pyramid. The exhibition includes the seven-and-a-half hour long film, À contre-temps, À perte de vue, in which Buren presents a series of photos, films, interviews, explanations, memories, criticisms, and theoretical texts, drawing on works that he has made since the 1960s and grouped according to theme in alphabetical order.
Across the walls of the gallery, a succession of pyramids in high relief extend their three dimensions into mirrored prisms made of complementary colours or otherwise, each punctuated by 8.7 cm-wide black and white stripes. Here the famous visual tool that Buren invented in 1968 returns again in the construction of works capable of creating a wealth of new bearings for the inquisitive gaze. The colossal word ‘pyramid’, encrusted with its thousands-of-years-old archaeological history, is destabilised by the adjective ‘pyramidal’, which indicates a modus operandi. The pyramid’s pyramidal form is set in motion through the accumulation of adjoining primary units—the prism bricks—and the interactions of colour and light. Each pyramid is at once site specific and situated. In other words, according to Buren’s own artistic vocabulary, each creation depends absolutely on the place in which it appears and the presence, here and now, of the visitor. But each of these ‘Pyramidals’ is also ‘situated’, and hence susceptible, following certain rules, of transforming itself into a new work as a result of its dependence on a different environment.
Buren’s works can never be disengaged from the place in which they are shown. This interdependence between the variable place and the repetitive elements of the work are at the heart of his thinking: the work of art is not an object, it is rather a place from which to perceive the world. The history of art is a succession of formal adventures and so, one has to hope, of thoughts. However, this not a question of progress, but rather of changing points of view. The real is infinite and the reality of the moment is no more than a possible version, among a multitude of others waiting to be formulated. Buren’s work helps to redefine of the world. ‘Les Deux Plateaux’ (1986), in the courtyard of the Palais-Royal, nicknamed les colonnes de Buren, is the most famous example of this. In 1985, the work was subject to an avalanche of acrimony, its case was brought before the courts and it narrowly missed being demolished. Today the black and white marble columns are a revered site on the contem- porary art map and continue opening the world to other possibilities. This was made evident three years after they had been put in place, with the unveiling of Ieoh Ming Pei’s Pyramide du Louvre, bringing together contemporary glass and metal with the historic stone of the old royal palace.
Buren’s activity as an artist is so widespread that mentioning his Golden Lion at the 1986 Venice Biennale, his site-specific exhibition at the Guggenheim Museum in New York in 2005, and his reinvention of the Pompidou Centre in Paris for ‘Le Musée qui n’existait pas’ in 2002 would be only the beginning of a very long list. It would in fact be very difficult, even impossible, and, itwould have to be said, contradictory, to organise a complete retrospective of his works. For a good reason: the site-specific works are either destroyed when they leave the exhibition space they depended on, or they remain definitively tied to their place if they are permanent installations. In both cases they can’t be brought together at the same time in the same place. Buren’s fidelity over the years to his initial position poses the question of the trace. Just as the footprint indicates the path taken by the hiker, the absence of the work here signals its presence. It writes its trace in the real. Creation here doesn’t impinge on space through its materiality but rather produces effects of freedom. This is how a great artist inscribes the world: letting existence unfold itself in vaster patterns. Together, ‘Pyramidal’ and À contre-temps, À perte de vue explore forms and traces, a homage to the risk of living and the risk of creating:
‘Traveller, there is no path
The path is made by walking’.
Here and now.
Annabelle Gugnon
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Kamel Mennour est heureux de présenter l’exposition « Pyramidal, hauts-reliefs, travaux in situ et situés, 2017 » de Daniel Buren.
« Il ne peut y avoir de vision sans pensée. » Cette affirmation de Daniel Buren est au fondement d’une œuvre considérable qui, sur les cinq continents et en plus de cinquante années, a ouvert le regard contemporain à des horizons aussi inventifs que déboussolants. Pour sa cinquième exposition à la galerie kamel mennour, l'artiste explore de nouvelles perspectives : « Pyramidal, hauts-reliefs, travaux in situ et situés, 2017 » réinitialise et remet en jeu la forme mythique de la pyramide. L’exposition donne aussi à voir À contre-temps, À perte de vue, un film-fleuve de 7 heures 30 où Daniel Buren présente une suite de photos, de films, d’entretiens, d’explications, de souvenirs, de critiques, de textes théoriques en s’appuyant, au travers de grands thèmes se succédant par ordre alphabétique, sur une partie de ses travaux s’étendant de 1960 à aujourd'hui.
En haut-relief sur les murs de la galerie, quelques pyramides développent leurs trois dimensions en des prismes de miroir, de couleurs complémentaires ou non, ponctuées de bandes noires et blanches de 8,7 cm de large chacune. Le fameux « outil visuel », terminologie inventée en 1968, participe une nouvelle fois à l’instauration d’œuvres où le regard s’enrichit de la quête de repères inconnus. Le mot, colossal, « pyramide », serti par une histoire millénaire et achéologique, est déstabilisé par l’adjectif « pyramidal » qui indique un modus operandi. La forme primordiale de la pyramide est mise en mouvement par l’adjonction et l’accumulation d’une unité première — la brique en prisme, et par les interactions des couleurs et les reflets de la lumière. Chaque pyramide est à la fois in situ et située. Autrement dit, selon le vocabulaire plastique initié par Daniel Buren, chaque création est en dépendance absolue avec le lieu qui l’accueille et avec la présence, ici et maintenant, du visiteur. Mais aussi, pour ces « Pyramidal », chaque œuvre est « située » donc susceptible, selon certaines règles, de se transformer en une oeuvre nouvelle du fait de sa dépendance à un environnement différent.
En aucun cas, les œuvres de Daniel Buren ne peuvent être désolidarisées de l’endroit où elles sont montrées. Cette interdépendance entre le lieu variable et les composants fonde la pensée de l'artiste : l’œuvre d’art n’est pas un objet ; elle est un lieu à partir duquel percevoir le monde. L’histoire de l’art est une succession d’aventures formelles donc, faut-il espérer, de pensées. Toutefois, il n’y est pas question de progrès mais de changements de point de vue. Le réel est infini et la réalité du moment n’en est qu’une version possible, parmi une multitude d’autres à élaborer. L’œuvre de Daniel Buren participe à la redéfinition du monde. « Les Deux Plateaux » (1986), dans la cour d’honneur du Palais-Royal, surnommés « colonnes de Buren » en est l’exemple le plus célèbre. En 1985, cette œuvre a soulevé des hordes d’acrimonies, a été jugée par les tribunaux et a failli être démolie. Ces colonnes de marbres noir et blanc sont aujourd’hui un haut lieu d’art et ouvrent le monde à d’autres possibles. À commencer par l’inauguration, trois années après « Les Deux Plateaux », de la Pyramide du Louvre, de Ieoh Ming Pei mariant verre et métal contemporains aux pierres historiques du palais.
Le déploiement artistique de Daniel Buren est si large que citer son Lion d’Or à la Biennale de Venise (1986), son exposition in situ au musée Guggenheim de New York (2005), ou sa réinvention du Centre Pompidou pour « Le Musée qui n’existait pas » (2002) ne serait que le début d’une très longue liste. Il serait difficile de fait, même impossible, voire contradictoire, d’organiser une rétrospective complète de ses créations. Et pour cause : les œuvres in situ sont détruites lorsqu’elles quittent le lieu d’exposition duquel elles sont dépendantes ou bien définitivement liées aux lieux auxquels elles appartiennent si elles sont permanentes. Dans les deux cas non associables au même moment dans un même lieu. Cette fidélité de l'artiste à sa prise de position première pose la question de la trace. Comme l’empreinte du pas indique le sentier du randonneur, l’absence de l’œuvre signale ici sa présence. Et inscrit son sillon dans le réel. La création ne s’impose pas par sa matérialité mais produit des effets de liberté. C’est ainsi qu’un grand artiste marque le monde : en permettant à l’existence de se déployer de manière plus vaste. « Pyramidal » s’adjoint à À contre-temps, À perte de vue pour explorer les formes et les traces. Comme un hommage au risque de vivre et au risque de créer :
« Voyageur, il n’y a pas de chemin
Le chemin se fait en marchant ».* Ici et maintenant.
Annabelle Gugnon