For Real

For Real

47 rue Saint-André des Arts Paris, 75006, France Friday, March 27, 2015–Wednesday, May 13, 2015 Opening Reception: Friday, March 27, 2015

Commissaire : Anne Pontégnie

Daniel Buren
Valentin Carron
Camille Henrot
David Hominal
Alex Hubbard
Sergej Jensen
Yves Klein
Jutta Koether
Mathieu Malouf
Helen Marten
Pablo Picasso
Robert Rauschenberg
Kurt Schwitters
Daniel Spoerri
Fredrik Værslev

L’exposition est née d’une invitation, posée comme un défi, à penser une exposition à partir de quelques artistes que la galerie kamel mennour souhaitait réunir. La conversation qui est née de cette question nous a permis de mettre à jour la résurgence contemporaine d’une stratégie fondatrice de l’art moderne. Celle d’utiliser ‘tel quel’ - pour de vrai - des matériaux usuels dans l’espace pictural. De la simple planche de bois chez Hominal aux champignons de Mathieu Malouf, des instruments de musique de Valentin Carron aux débris d’Alex Hubbard, des accessoires SM de Jutta Koether aux tissus de Sergej Jensen, le geste se retrouve, au-delà des divergences fondamentales de leurs projets esthétiques. Que les matériaux soient utilisés comme matière picturale chez Jensen ou Hominal, ou renvoient au réel de manière plus explicite comme c’est le cas pour Alex Hubbard et Jutta Koether, ils jouent un rôle également générateur de formes et de sens. Par texture ou par volume, ils introduisent une hétérogénéité qui permet de renouveler les possibilités picturales en même temps qu’ils viennent briser la distinction entre l’abstraction et la figuration, le réel et sa représentation. Ces matériaux sont aussi systématiquement associés à une dimension ludique, parfois humoristique. Leur origine modeste, la littéralité de leur présence, leur banalité intrinsèque viennent empêcher toute transcendance et mettent en cause l’autonomie du tableau en l’inscrivant dans le quotidien et le trivial.

Il est symptomatique que ce type de geste refasse surface chez de nombreux artistes contemporains1 au moment même où la peinture, et plus particulièrement la peinture abstraite, règne en maître sur la scène de l’art. C’est dans un contexte esthétique dominé par les derniers feux de l’impressionnisme et la naissance de l’abstraction que Picasso, Braque et Kurt Schwitters introduisent des objets usuels dans l’espace pictural pour y déployer un ensemble d’effets ludiques et conceptuels qui leur permettent de le réinventer. De même, dans les années 50, c’est en réaction à la domination et à l’essoufflement de la seconde École de Paris et de l’Expressionisme Abstrait que les Nouveaux Réalistes en France et Rauschenberg et Jasper Johns aux États-Unis font à nouveau appel à l’objet pour détourner la peinture de son épuisement formel et de son emphase existentielle.

Ces trois moments de l’art se caractérisent par la manière dont les artistes qui utilisent cette stratégie du « pour de vrai » n’abandonnent pas le terrain de la peinture mais au contraire exploitent ces matériaux pour les opportunités formelles qu’ils leur offrent sans jamais complètement basculer ni du côté de l’idée ni du côté du pop. À travers trois moments d’un geste, et ses variations, l’exposition cherche à faire percevoir comment en peinture, l’humour peut être formel et l’invention subversive.

Anne Pontégnie

1 En plus des artistes présentés dans l’exposition, je pense aussi à Nina Beier, Valentina Liernur, Neïl Beloufa, Laura Owens, ou George Henry Longly

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Curator : Anne Pontégnie

Daniel Buren
Valentin Carron
Camille Henrot
David Hominal
Alex Hubbard
Sergej Jensen
Yves Klein
Jutta Koether
Mathieu Malouf
Helen Marten
Pablo Picasso
Robert Rauschenberg
Kurt Schwitters
Daniel Spoerri
Fredrik Værslev

The current exhibition began with an invitation, almost a challenge, to come up with an exhibition based on the work of some artists kamel mennour gallery wanted to bring together. The conversation that came out of this was an occasion for us to draw attention to the contemporary resurgence of that founding strategy of modern art that involves using actual, everyday materials in the pictorial space. Beyond the fundamental divergences of their respective aesthetic projects, one sees this gesture return, from Hominal’s simple wooden plank to Mathieu Malouf’s mushrooms, Valentin Carron’s musical instruments, Axel Hubbard’s debris, Jutta Koether’s S&M accessories, and Sergej Jensen’s fabrics. Whether they are used themselves as pictorial materials, as by Jensen and Hominal, or touch upon the real in the more explicit manner of Alex Hubbard and Jutta Koether, these materials play a role equally generative of forms and sense. Through texture or volume, they introduce a heterogeneity that allows for a renewal of pictorial possibilities, while breaking down the distinction between abstraction and figuration, the real and its representation. These materials are also systematically associated with a playful, sometimes humorous aspect. Their modest origins, the literality of their presence, their intrinsic banality block all transcendence and question the autonomy of the painting by enrolling it in the realm of the everyday and the trivial.

It is symptomatic that this sort of gesture should resurface among a number of contemporary artists1 at the very moment when painting, and more particularly abstract painting, is lording it over the art scene. It was in such an aesthetic context, dominated by the last lights of Impressionism and the beginnings of abstraction, that Picasso, Braque, and Kurt Schwitters introduced normal objects into the pictorial space in order to unfold there a series of playful and conceptual effects with which they could use to reinvent it. During the 50s, it was likewise in reaction to the airlessness of painting under the domination of the second Paris School and Abstract Impressionism, that the Nouveaux Réalistes in France and Rauschenberg and Jasper Johns in the US started to make use of objects as a way to release painting from its formal exhaustion and its emphatic existential status.

These three moments in art history are each characterised by the way in which the artists who choose such a strategy of painting ‘for real’ have not abandoned the field of their medium but have rather made use of these materials for the formal opportunities they bring into play, without the work ever going all the way over into either conceptual or pop art.

Through three stages of a gesture and its variations, the exhibition is an attempt to bring to light how in painting humor can be formal and invention subversive.

Anne Pontégnie

1 Along with the artists represented in this exhibition, I am also thinking of Nina Beier, Valentina Liernur, Neïl Beloufa, Laura Owens, and George Henry Longly.