Gustav Klimt: 25 Dessins

Gustav Klimt: 25 Dessins

93, Faubourg Saint-Honoré Paris, France Tuesday, September 9, 2008–Saturday, October 4, 2008

En juillet 1902, le célèbre sculpteur Auguste Rodin visita l’exposition “Beethoven” organisée dans le Palais de la Sécession. Durant la réception qui suivit dans le parc du Prater, il confia à Gustav Klimt: “ Je n’ai encore jamais rien ressenti de semblable à ce que je ressens chez vous ici. Votre fresque Beethoven, si tragique et si heureuse à la fois; votre exposition grandiose, inoubliable, et maintenant ce jardin, ces femmes, cette musique...Qu’est-ce que cela peut bienêtre?”. Klimt ne répondit qu‘un seul mot: “L‘Autriche !”.

Le second fils d’une famille de sept enfants, Gustav Klimt naît à Baumgarten (près de Vienne) le 14 juillet 1862 dans une famille D‘artistes: un père orfèvre, une mère chanteuse lyrique, un frère, Ernst, qui travaillera avec lui jusqu‘à sa mort prématurée, un autre frère, Georg, sculpteur et encadreur, qui réalisera entre autres de nombreux cadres pour ses toiles. Gustav, dont le talent est très vite remarqué, est inscrit, à 14 ans, à la Kunstgewerbeschule de Vienne (Ecole des Arts Décoratifs). F. Laufberger et J.V. Berger, ses maîtres, lui apprendront toutes les techniques artistiques dont celle de la fresque, de la peinture à l’huile mais aussi de l’art de la mosaïque. Avec deux autres élèves, son frère Ernst et Frantz Matsch, ils réalisent des oeuvres proches de l’art d’Hans Makart, le grand peintre viennois pompier de la fin du XIX° siècle. Dès 1883, les trois étudiants créent un atelier, la “Kunstler Compagnie”, qui connaît un rapide succès grâce à la finesse de leurs décorations dans un goût très académique: plafonds, décors de thêatre et d’édifices publics, salles de réunion du Palais Sturany (Vienne), villa Hermés de Lainz ou encore les escaliers de Burgtheatrer... En 1887, le conseil municipal de Vienne demande, à Matsch et à Gustav Klimt, de peindre une vue intérieure de la Salle de l’ancien théâtre impérial avant sa destruction; plutôt que de montrer la scène, ce dernier choisit de représenter toute la bonne société viennoise (environ 150 portraits) mais vue de la scène. L’achèvement de la décoration de l’escalier du Kunshistorisches Museum de Vienne consolide sa réputation. L’année suivante, il parcourt l’Europe, tout particulièrement l’Allemagne et lÕItalie. De 1891 à 1897, Klimt est membre de la «Kunstlerhaus», association d‘artistes viennois fondée en 1861 pour promouvoir l‘art autrichien. A la mort de son frère Ernst, en 1892, il se dégage peu à peu de cet académisme étouffant pour s’inspirer de l’art asiatique et du symbolisme. En mars 1897, il crée avec un groupe d‘artistes autrichiens, un mouvement appelé «Sécession» dont le but est: d’offrir aux jeunes peintres non-conformistes la possibilité d‘exposer leurs œuvres, montrer les artistes étrangers d’avant-garde et publier une revue (Ver Sacrum) et changer la société par l’Art. Les membres de la Sécession sillonnèrent l’Europe afin de faire découvrir au public viennois des artistes comme Rodin, Puvis de Chavannes, Whistler, Sargent ou Khnopff...La première exposition fut un triomphe: 57 000 visiteurs dont l’Empereur et 218 œuvres vendues sur les 534 exposées. Quelques réalisations marquèrent aussi les esprits: la décoration, en 1898, de la salle de musique de l’industriel N. Dumba pour qui il peint «Music II» et «Schubert au piano», puis l’œuvre «Nude Veritas», enfin la commande de trois toiles pour l’Université représentant «La Philosophie», «La Jurisprudence» et «La Médecine» qui provoquèrent un scandale et des débats jusqu‘au Parlement. En 1902, année capitale pour le mouvement, il peint une grande fresque, pour la 14ème exposition de la Sécession, en l‘honneur de Beethoven, dans le merveilleux Pavillon dessiné par Josef Maria Olbrich. En 1903, la création par K. Moser et J. Hoffmann d‘une nouvelle association, la «Wiener Werkstätte», (dont le but était de créer des œuvres accessibles à tous, remettre en valeur les métiers d’art et d‘artisanat), fut un facteur essentiel du renouveau des arts appliqués en Autriche. Klimt quitte la «Sécession» en 1905 et épure son style, évitant à partir de 1909, l‘utilisation des aplats d‘or.

Considéré comme un artiste majeur, les commandes et les honneurs ne cessent d‘affluer: en 1908, l‘Etat autrichien achète sa toile emblématique «Le baiser» puis un paysage en 1912. En 1910, il a l’honneur d’une exposition individuelle lors de la Biennale de Venise avec Courbet et Renoir. Dès 1912, Klimt n’est plus considéré comme assez «moderne» et Schiele et Kokoschka sont désormais chargés de représenter l‘Autriche lors des expositions internationales. Klimt décède à Vienne le 6 février 1918.

Les influences de l’art chinois ou japonais qu’il collectionnait, L’art de l’ancienne Egypte, les enluminures, le symbolisme, le mouvement anglais Arts & Crafts, ou les motifs gothiques qui le fascinaient, sont omniprésentes dans son œuvre.

Dans les dessins de nus que nous présentons, rapides et libérés de toute convention sociale, Klimt parvient à transcrire, par quelques traits, des femmes lascives, un érotisme troublant, la sensualité à fleur de peau de ses modèles. Le spectateur devient témoin et même voyeur de ces femmes alanguies ou impudiques. Il caresse ou effleure de son crayon les courbes de leurs corps et exalte la fragilité féminine. L’inexistence d’un arrière-plan, d’une indication de lieu ou d’un quelconque modelé, accentuent l’intemporalité de ces femmes nues qu’elles soient vues comme des objets, des tentations ou des frustrations. Comme dans les estampes japonaises, Klimt accentue l’érotisme par un «habillage déshabillant», laissant deviner une poitrine ou un sexe, cachés sous une robe ou un tissu ou les exhibant pour attirer notre regard.

A l’opposé de l’aspect inquiétant des personnages d’Egon Schiele, la rage ou l’amour de Pablo Picasso pour ses modèles, Gustav Klimt sublime le corps féminin, sa beauté et ses mystères.